Face au racisme, la handballeuse Fanta Keita appelle à « agir en nombre et au quotidien »
Fanta Keita, handballeuse professionnelle et internationale sénégalaise, a écrit un texte suite à l’assassinat de l’Américain noir, George Floyd, par un policier. Elle prône l’action et l’éducation pour mieux vivre ensemble.
Les images sont terribles et suscitent la révolte dans le monde entier. Un policier, blanc, maintient un homme à terre en lui enfonçant son genou dans la gorge. Pour avoir été soupçonné d’utiliser un faux billet de 20 dollars, George Floyd, un Américain de 46 ans, noir, est mort asphyxié le 25 mai. Depuis, des manifestations se déroulent dans une centaine de villes aux Etats-Unis pour protester contre ce racisme systémique et ce nouveau cas de violences policières. En France, mardi 2 juin, plus de 20 000 personnes se sont rassemblées pour réclamer justice pour Adama Traoré, décédé suite à un contrôle de police, faisant le lien entre ces deux affaires.
De nombreux athlètes prennent la parole depuis plusieurs jours pour dénoncer le racisme meurtrier que subissent les personnes à la peau noire. Fanta Keita, handballeuse professionnelle et internationale sénégalaise, a souhaité s’exprimer sur le sujet. «Quand je me suis réveillée hier matin, j’ai vu sur Instagram que tout le monde publiait une image totalement noire (NDLR mardi 2 juin, en soutien à la communauté noire). Je me suis dit qu’il se passait quelque chose, qu’il y avait beaucoup plus de gens mobilisés cette fois-ci. Je n’ai pas pour habitude de manifester mon indignation sur les réseaux sociaux. Je préfère agir dans la mesure du possible. Mais là, devant le nombre, je me suis dit, pourquoi pas écrire ? Je voulais éveiller un intérêt sur la conscience collective qu’on devrait avoir et faire connaître ma pensée sur ce qui se passait actuellement ».
« Au lieu de tomber dans la colère, mieux vaut ne pas y prêter attention. »
Sur la vidéo filmant l’homicide, la sportive de 24 ans est choquée par l’absence de réactions pendant l’arrestation. « Comment est-ce possible de laisser quelqu’un mourir comme cela ? s’interroge Fanta Keita. S’il y avait eu 80 personnes autour du policier, il aurait été forcé de se lever. »
Elle-même dit avoir peu souffert du racisme au cours de sa carrière. « Sur des matchs, lorsque j’étais plus jeune, j’ai déjà entendu des cris de singes ou des remarques du genre « Ici, on ne joue pas comme ça ». Mais pour être honnête, je ne m’en rappelle quasiment plus. Au lieu de tomber dans la colère, mieux vaut ne pas y prêter attention. Et en revanche, apprendre à intervenir quotidiennement pour ne pas laisser de tels actes se produire. »
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En réaction à ces événements, Fanta Keita, par ailleurs diplômée en journalisme, a pris sa plume pour sensibiliser à la nécessité d’agir, afin de vivre mieux ensemble. Voici son texte.
« On parle de racisme noir, de racisme racial aujourd’hui. Mais on parle de racisme tout court. C’est bien de se battre pour une cause. Mais ça doit être le début de toutes les autres causes. Racisme religieux, racisme ethnique, racisme social, RACISME. Si le premier pas est de faire un post, pourquoi pas. Mais dorénavant apprenons, à AGIR. Au QUOTIDIEN.
Il aura fallu une pandémie mondiale pour que les gens fassent preuve de moins de négligence. Fassent preuve un peu plus de discipline et d’éducation collective. Il aura fallu des centaines de morts, de près ou de loin. Pour que chacun fasse un peu plus attention à l’autre.
Et maintenant il aura fallu le cas de George Floyd, pour enfin apprendre à s’énerver COLLECTIVEMENT sur des actes de racisme. Et ce, partout dans le monde.
Éduquons-nous. Apprenons à être quotidiennement des citoyens du Monde. À agir lorsque nous voyons toutes formes d’inhumanité.
Apprenons à répondre à l’autre lorsqu’une situation dégradante se passe sous nos yeux. Que ce soit des bavures policières ou de simples remarques déplacées en tout genre. Apprenons à être citoyens. Des VRAIS. Et Solidaires.
Ne soyons pas juste spectateurs, même en diffusant la situation via les réseaux sociaux. INTERVENONS, et à PLUSIEURS, lorsque ces situations arrivent.
Toutes ces situations se produisent aussi parce que, à notre petite échelle, on n’essaye pas d’intervenir lorsque cela se déroule sous nos yeux. Ou bien, on se retrouve seul, sans force pour agir, et on a peur de le faire…Mais à plusieurs tout est possible. Sans violence bien évidement, mais en revanche, en défendant la personne qui subit l’oppression.
Intervenez à PLUSIEURS, en essayant de SAUVER la personne concernée si cela est possible. INCITEZ les autres autour de vous. Que vous les connaissiez ou non, incitez-les à intervenir avec vous quand des actes intolérables se produisent sous vos yeux. Quelles que soient les lois, il est impossible de laisser des gens mourir…surtout lorsqu’ils n’ont pas les moyens de se défendre.
Agissons en NOMBRE, intervenir seul ne fera pas avancer. Intervenons en NOMBRE et au QUOTIDIEN. C’est la solution.
Tous ces petits pas collectifs seront des petits pas pour tous les autres combats. »
Propos recueillis par Mejdaline Mhiri
Photo : Jonathan Chapon
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