Sur les 33 médailles remportées par la France aux Jeux olympiques de Tokyo, 18 l’ont été par des athlètes féminines. Certaines étaient attendues, comme Clarisse Abgegnenou, d’autres moins, comme Laura Tarantola et Claire Bové. Il y a aussi eu des médailles manquées, en VTT, et des apothéoses. Retour sur la quinzaine des Bleues et, plus largement, des Jeux.
Ces Jeux olympiques s’annonçaient comme ceux de la parité. Autant d’épreuves masculines que féminines, de nouvelles épreuves mixtes, 48,6 % de femmes chez les athlètes… La France, pas exemplaire au départ avec 218 sportifs qualifiés pour 173 sportives, a finalement rendu une copie parfaite. Quinze médailles chez les hommes, quinze chez les femmes, et trois obtenues en mixité. La délégation tricolore peut dire merci aux épreuves par équipes : Vincent Luis et Cassandre Beaugrand, qu’on attendait avec l’or autour du cou, ont bien failli repartir les mains vides avant d’unir leurs forces dans le relais. En judo, les Bleu·es ont réussi l’un des exploits les plus marquants des Jeux : battre en équipe le Japon chez lui. Clarisse Abgegnenou, déjà dorée en individuel, a ouvert la voie. Sarah-Léonie Cysique, l’argent amer, a pris sa revanche pour offrir l’or à une équipe en folie.
Les Jeux olympiques de l’arbitrage
C’est que ces Jeux, et le judo en particulier, ont été riches en larmes et en polémiques arbitrales. Ramenée sur la nuque par son adversaire sur une prise en finale des -57kg, Sarah-Léonie Cysique a été jugée responsable d’une attaque dangereuse pour son intégrité physique. Disqualification, une médaille d’or qui s’envole, et une détresse insondable en conférence de presse. Incompréhension aussi pour Maïva Hamadouche, donnée perdante dès son premier combat par les juges. Son adversaire avait pourtant pris plus de coups, et même été sanctionnée dans la dernière reprise. Dégoûtée, la policière parisienne va vite revenir au monde professionnel.
Camille Lecointre et Aloïs Retornaz auront aussi leur mot à dire sur l’arbitrage. Sixième de la Medal Race en 470, les Françaises ont empoché la médaille de bronze. Mais l’argent aurait du leur revenir, sans une dernière manœuvre curieuse des Britanniques, assurées d’être en or. Au passage de la dernière bouée, elles ont laissé passer les Polonaises, petit signe de la main en guise de remerciement bien visible à la caméra. Assez pour que la Pologne souffle la deuxième place aux Bleues. Malgré la protestation des Françaises et un long moment passé sous la tente des commissaires, le classement ne change pas.
Toutes les larmes de nos corps
Voilà pour l’arbitrage, qu’on se hâtera d’oublier. Les Jeux olympiques sont avant tout le théâtre des rêves, des émotions, des joies et des peines de l’humanité. Et parfois, ce maelstrom est trop intense. Simone Biles, meilleure gymnaste de l’histoire, a ainsi vu ressurgir « les démons dans sa tête ». Incapable de se concentrer et en plein deuil familial, elle a fait l’impasse sur quatre finales. Finalement présente sur le dernier agrès, elle décroche la médaille de bronze à la poutre, la médaille d’or du courage. Tout aussi engagée pour la santé mentale des athlètes, Raven Saunders a croisé les bras sur le podium. Laurel Hubbard est quand à elle devenue la première athlète transgenre à participer aux Jeux. L’Histoire s’écrit parfois le souffle coupé.
Au rayon des larmes, il y a celles de la déception. Caroline Garcia quitte le court en pleurs, défaite au premier tour du simple et du double. Regrets aussi pour Pauline Ferrand-Prévôt, maudite sous le signe des anneaux. Avec Loana Lecomte, elles devaient se battre pour l’or. Les deux Françaises ont échoué à monter sur le podium du VTT. Quand au tatami du Nippon Budokan, il a tout simplement été inondé chaque jour. Médaillée d’argent, Madeleine Malonga parvenait à peine à s’exprimer entre deux sanglots. Les larmes de Romane Dicko, bronzée pleine de promesses, étaient plus lumineuses.
Mais c’est surtout le regard humide de Clarisse Agbegnenou, enfin titrée cinq ans après Rio, qui a nous a tiré la larmichette. Et ce n’était pas fini. Même les cœurs les plus durs et les plus froids sont vite devenus des glaçons fondus dans l’océan des yeux noyés de larmes de Claire Bové. Aux côtés de sa comparse Laura Tarantola, on n’avait jamais vu une médaille d’argent plus radieuse que celle de l’avironneuse. Il faut dire que la leur, la première chez les Françaises dans la discipline depuis vingt-six ans, s’est joué à quelques centièmes de secondes après deux kilomètres d’efforts.
🗣 "Franchement c'est ouf ! C'était un rêve de rentrer avec la médaille, maintenant on peut dire qu'on est vice-championne olympique"
😍 La réaction de Claire Bove et Laura Tarantola après leur médaille d'argent en aviron deux de couple poids légers. pic.twitter.com/UgTVVESwhs
— francetvsport (@francetvsport) July 29, 2021
Échecs en séries
Les médailles ont manqué ailleurs. Les Australiennes Emma McKeon et Ariarne Titmus ont écrasé la natation. Même Katie Ledecky ne pouvait pas rivaliser, alors il était vain d’attendre un podium tricolore, fut-il de Marie Wattel ou de Charlotte Bonnet. Pire, le relais 4x100m n’a pas dépassé les séries. La natation française doit se remettre en question, et l’athlétisme aussi. Ridiculement moins nombreuses que les hommes, les athlètes françaises n’ont pas pu rivaliser sur le tartan. Au crépuscule de leur carrière, Alexandra Tavernier et Mélina Robert-Michon ont manqué le baroud d’honneur, là où Allyson Felix a remporté sa 11e médaille. Un record dans l’histoire de l’athlétisme aux Jeux. Les finales ont manqué un peu partout, notamment au 800m d’une Rénelle Lamote satisfaite d’avoir vaincu le spectre des séries.
L’esprit d’équipe
À croire que les Françaises n’étaient pas destinées à gagner en solo. On avait presque préparé la Marseillaise pour Ysaora Thibus lors de l’individuel… Elle a embarqué le reste de l’équipe de France dans une remontada improbable en demi-finale pour offrir une médaille d’argent au fleuret par équipe, sevré de podiums depuis 1984. Les sabreuses ont fait plus fort encore. Le bronze de Manon Brunet et l’argent par équipe sont les premières médailles féminines de cette lame. Retour aux larmes, pour notre plus grand bonheur.
La moisson des sports collectifs prend donc tout son sens. Peut-être même que le basket 3×3 est arrivé trop tôt, avec une quatrième place finale pour les Françaises. Les Bleues du rugby à 7 sont allées chercher une finale historique contre la Nouvelle-Zélande, avant un dernier week-end hors-norme. Au milieu de trois finales masculines, les basketteuses ont pris leur revanche sur la Serbie, championne d’Europe à leurs dépens le mois dernier, pour décrocher le bronze. Dernière médaille mais non des moindres : le handball en or, pour conclure en beauté la quinzaine olympique. Un titre historique, inédit, marqué du sceau de Cléopâtre Darleux, mère et mur infranchissable, et de Pauletta Foppa, icône en devenir.
Ainsi, les athlètes françaises ont appliqué à la lettre la nouvelle devise des Jeux : plus vite, plus haut, plus fort… Ensemble !
Crédit photo : Équipe de France olympique et paralympique
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