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Paris 2024 (boxe) : Édito. Imane Khelif, championne olympique malgré tout

Mejdaline Mhiri
09.08.2024

Malgré une pluie d’insultes ces derniers jours remettant en cause son genre « trop masculin », la boxeuse Imane Khelif est devenue championne olympique des -66 kg dans un stade Roland-Garros totalement acquis à sa cause. Après la gymnaste Kaylia Nemour, elle apporte sa seconde médaille à l’Algérie. La deuxième en or. 

Comment la boxeuse Imane Khelif est parvenue à se préparer correctement pour remporter cette finale des -66 kg à Paris ? Depuis quelques jours, l’Algérienne est victime d’une terrible campagne de diffamation lancée à son encontre sur son genre jugé « trop masculin ». Une affaire qui rappelle notamment celle de Caster Semenya. Retour en arrière.

En mars 2023, Imane Khelif est disqualifiée des mondiaux féminins de boxe amateur. Une autre boxeuse, la Taïwanaise Lin Yu-ting, subit le même sort, pour des raisons identiques. D’après la Fédération internationale de boxe (IBA), ces sportives ont passé des tests médicaux qui indiqueraient qu’elles ne remplissent pas les critères d’éligibilité pour participer à la compétition. Selon la Fédération, ces deux boxeuses disposent « d’un avantage compétitif sur les autres compétitrices féminines ». C’est-à-dire d’un taux trop élevé de testostérone, quand bien même il n’a jamais été prouvé sur le plan scientifique que la testostérone soit le gène de la performance.

Cependant, en août 2023, Imane Khelif est autorisée à participer aux Jeux de Paris par le Comité international olympique (CIO) justifiant « qu’il est établi dans ce cas que ce sont des femmes ». Ainsi, pour son entrée en lice en début de semaine, Imane Khelif affronte et bat l’Italienne Angela Carini qui abandonne le combat au bout de 46 secondes en raison d’un coup « trop fort » sur le nez. La Transalpine refuse ensuite de serrer la main à la Maghrébine (elle s’en excusera plus tard). Il n’en fallait pas plus à Giorgia Meloni, Première ministre italienne d’extrême-droite, pour dénoncer « un combat qui n’était pas sur un pied d’égalité », bientôt suivit par Donald Trump annonçant qu’il « exclurait les hommes des compétitions de femmes » s’il était élu président des États-Unis en novembre.

Les accusations diffamantes pleuvent sur Imane Khelif. Elle serait transgenre, un homme, trop fort, et ne devrait pas concourir. 

La fierté de ses compatriotes 

Malgré les torrents de haine que subissent les personnes qui ne rentrent pas dans les normes conservatrices du genre, il faut dire qu’Imane Khelif a également bénéficié de soutiens. Le Comité olympique algérien, d’abord, qui a dénoncé les attaques contre son athlète, mais aussi de ses compatriotes et de la diaspora algérienne en France. Ce soir, il n’y avait qu’à voir les très nombreux drapeaux blanc et vert frappés d’un croissant et d’une étoile rouge dans les travées du Stade Roland-Garros pour ressentir le soutien populaire envers la championne. Lorsque son nom a été annoncé par le speaker, les encouragements n’ont jamais cessés. Plus tard, les youyous et le traditionnel « One, two, three, viva l’Algérie » ont été repris avant que le public ne se lève à la fin du combat. 

Mercredi dernier, sur France Télévisions, l’ancien champion olympique tricolore Brahim Asloum s’est indigné du traitement réservé à l’athlète de 25 ans. « Vous savez pourquoi j’ai mal pour elle ? Parce que toute sa vie on va lui poser la question de savoir si c’est un homme ou une femme. Waouh, quel manque de respect. Pour du sport, pour des intérêts personnels. Parce que le monsieur de la IBA s’est fait exclure, parce qu’ils ne font que des choses incorrectes. » En effet, l’an passé, le CIO avait exclu l’IBA, dont le président est un proche de Vladimir Poutine, et récupéré l’organisation du tournoi olympique.

Ce soir, avec la victoire d’Imane Khelif, le sport et les femmes ont gagné un magnifique combat. 

Mejdaline Mhiri
09.08.2024

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