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Paris 2024 – Marie-Amélie Le Fur : « Il faut faire perdurer tout ça dans le temps »

Mejdaline Mhiri
08.09.2024

L’heure du bilan s’approche pour Paris 2024, les Jeux paralympiques étant sans conteste une réussite. Marie-Amélie Le Fur, présidente du Comité Paralympique et Sportif Français, livrait ce matin ses premières impressions et revenait sur l’impératif besoin d’héritage. 

Pendant près de deux semaines, la France a de nouveau vibré devant les exploits et les peines des para athlètes tricolores. La délégation française a totalisé 75 médailles réalisant ainsi un meilleur résultat que sur les cinq derniers Jeux paralympiques. Il faut remonter à Sydney, en 2000, pour voir la France faire mieux avec 86 breloques. Chacun.e s’accorde à dire qu’un retour en arrière, notamment sur l’accès au sport et la visibilité des personnes en situation de handicap, n’est pas envisageable. A commencer par Marie-Amélie Le Fur, présidente du CPSF. 

Plusieurs aides financières ont accompagné les athlètes avant les Jeux. Vont-elles perdurer ? 

Marie-Amélie Le Fur : Il n’y a pas de raison qu’elles ne le soient pas mais, dans les prochains mois, nous allons surtout faire le bilan des choix faits et des programmes mis en place. Au regard des résultats de l’équipe de France, on voit qu’il y a eu un véritable impact. Il faut voir quels ont été les leviers les plus déterminants pour redéfinir ensemble, avec toutes les parties prenantes, la nouvelle stratégie pour 2026 et 2028. 

Avec 19 médailles d’or, l’équipe de France atteint presque l’objectif des 20 annoncées. Qu’est-ce-qu’il a manqué pour y parvenir, pour en faire plus ?

On n’a pas vraiment la même stratégie que les pays qui sont devant nous (au tableau des médailles). Les Pays-Bas sélectionnent peu d’athlètes, uniquement des « titrables ». On a fait le choix d’une délégation plus large, de donner leur chance à des primos sélectionnés qui peuvent potentiellement être médaillés dans le futur. Mais on réussit l’ambition du top 8. On a triplé le nombre de médailles en huit ans (28 médailles à Rio contre 75 à Paris). Maintenant, il faut faire perdurer tout ça dans le temps.

Et pour cela, regarder là où cela a moins bien fonctionné…

Il y a des sports où il va falloir comprendre ce qu’il s’est passé, pourquoi on n’a pas été à la hauteur du rendez-vous. On sait aussi que si on veut durablement réussir dans le mouvement paralympique, il faut remonter en athlétisme. C’est le sport qui porte le plus d’épreuves et quand vous n’êtes pas à la hauteur, vous ne pouvez pas grimper aux dernières places (dans le tableau des médailles). Aussi, on doit encore féminiser notre équipe de France.

Durant sa carrière, Marie-Amélie Le Fur a remporté neuf médailles paralympiques, dont l’argent à la longueur à Tokyo. @CPSF / G.Picout

Seulement trois médailles d’or ont été glanées par des Françaises. Au-delà de l’augmentation du nombre de femmes dans la délégation, comment faire en sorte qu’elles performent ? 

Que trois, mais déjà trois ! A Tokyo, nous n’avions eu aucune championne paralympique ! Là, nos athlètes ont été au rendez-vous des plus belles médailles. Sur la représentation féminine dans les médaillés français, notre proportion est bien trop faible. Quand on regarde les nations qui sont devant nous, elles sont à 50-50. Les femmes y ont remporté autant de médailles que les hommes. Cela nécessite des évolutions structurelles. On doit peut-être avoir plus de dirigeantes féminines, avoir une incitation plus forte envers les jeunes filles par les différents acteurs du parcours de vie mais on doit aussi travailler sur l’incarnation, sur le rôle modèle.

Quels retours avez-vous eu de la communauté internationale sur les Jeux de Paris ? 

Quand les Britanniques vous disent « vos Jeux sont plus que réussis et font date dans l’histoire », vous savez que vous avez franchi un cap parce que ce n’est pas facile pour eux de le dire (sourire). Ils nous ont dit ça sur énormément de facteurs, que ce soit sur la gestion des délégations, la vie au village, les transports. La raison du succès, c’est que ce sont des sportifs qui ont leadé cette candidature, cette organisation. Ils savaient en quoi constituaient les besoins des athlètes. La deuxième chose qui a été saluée, c’est la ferveur du public. On n’est pas sur un record de billets vendus mais jamais on a eu une ferveur aussi forte*. 

Est-ce-que la France va continuer à organiser des événements majeurs dans le para sport ? 

Déjà, on va organiser les Jeux paralympiques d’hiver (en 2030). Mais bien évidemment, la volonté de la France est de continuer à organiser des grands événements internationaux parce que c’est aussi donner des rendez-vous réguliers aux Français. Quand les compétitions sont en France, elles génèrent beaucoup plus d’engouement, d’enthousiasme.

Etes-vous optimiste quant à la suite ? 

Je suis enthousiaste parce que j’ai des milliards d’anecdotes qui démontrent que les Français ont compris ce qu’on leur racontait depuis quatre ans. Et puis, avec le Comité paralympique, on a invité beaucoup de collectivités à vivre cette aventure à nos côtés. Derrière, cela change les politiques publiques et la façon dont la politique permet d’accéder au sport. Je suis confiante dans l’avenir parce qu’on a fait ensemble et maintenant on n’a plus envie de faire différemment. 

 

*2,5 millions de billets ont été vendus aux Jeux Paralympiques, contre 2,7 millions à Londres en 2012 mais, en comprenant les 9,5 millions de la période olympique, le record est battu. Le Royaume-Uni avait totalisé « seulement » 8,2 millions sur les Jeux olympiques. 

Mejdaline Mhiri
08.09.2024

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