Petite équipe face aux mastodontes du Paris-Roubaix, Le Stade Rochelais Charente-Maritime a accueilli Les Sportives sur cette troisième édition féminine de la Reine des Classiques. Découverte du quotidien d’une team en manque de moyens, mais empreinte de motivation.
« Allez go, direction le secteur 16. » Richard Rousseau et Maxilimien Venisse sont des passionnés de cyclisme. Leur mission bénévole, sur ce Paris-Roubaix 2023 : photographier les coureuses de l’équipe Stade Rochelais Charente-Maritime, qui compte six cyclistes dans cette nouvelle édition. Après un départ tonitruant à Denain, ils proposent aux Sportives d’embarquer avec eux pour suivre la Reine des Classiques en immersion dans leur voiture. Dans le talkie-walkie porté par Maximilien résonne la voix du directeur de course, Jean-Michel Monin. « À tous, je vous souhaite une bonne course, sur les pavés parfois secs, parfois humides, de Paris-Roubaix. »
C’est parti pour 145,5 kilomètres. Les deux compères ont prévu de s’arrêter à trois reprises sur le parcours, histoire de capter les coureuses de leur team en plein effort. « Ah bah c’est là, c’est la trouée d’Arenberg », lance t-il à Richard, en direction de la première étape, à Warlaing, sur le deuxième secteur pavé de la course. Pendant que Richard file à l’avant pour shooter les six cyclistes engagées, Maximilien reste à l’arrière avec deux roues de secours « en cas de pépin », et des gourdes pour ravitailler les plus assoiffées. « D’habitude, je fais la photo et la logistique tout seul. Là on est deux, c’est mieux. »
Soudain passe la Sud-Africaine Frances Janse van Rensburg, 21 ans, championne de son pays en 2023. « Allez Frances, allez ! », scande Max en l’applaudissant. Passionné de cyclisme depuis son enfance, cet opérateur d’usine bordelais n’a pas encore raté de Paris-Roubaix Femmes. « Le directeur sportif Jonas Dupuis m’a proposé de faire des photos parce que je suis passionné. Mais on est les petits amateurs : les participations de notre équipe dépendent quand même des invitations. »
« On est là parce qu’on veut aider les filles »
Champion du monde de coiffure masculine, Richard a moins d’ancienneté dans le Paris-Roubaix : côté féminin, c’est son premier. Mais il shoote les coureurs depuis 2016. « Ce que j’aime, c’est cet esprit de famille. » Pro depuis quatre ans, l’équipe du Stade Rochelais est le petit poucet sur cette troisième édition du Paris-Roubaix. Le pécule de la formation se concentre sur les salaires des coureuses, et moins sur la logistique. Six dans le staff, minuscule face aux dizaines de personnes pour les Trek-Segafredo ou autre Cofidis. « C’est la course sur laquelle on est le plus nombreux. »
Le Stade se déplace avec le camion atelier, un camping car, deux voitures équipes et deux voitures Skoda. Ça tranche avec les bus aménagés des autres teams. « On est là parce qu’on veut aider les filles. » En ce moment, Richard œuvre à la création d’une équipe de cyclistes de moins de 23 ans, la Riva 17 Formation. « Notre objectif, c’est de laisser les filles dans leur club mais de les accompagner. On ne veut pas les déraciner, mais qu’elles progressent en vivant chez leurs parents, et qu’elles poursuivent leurs études. Le but, c’est qu’elles restent en France et qu’elles ne rejoignent pas des formations étrangères. » Direction ensuite le secteur de Mons-en-Pévèle, dans les 50 derniers kilomètres. Au milieu des gendarmes et des spectateurs massés, Max tend un bidon à Marine Allione, en vain. « Elle m’a dit que ca allait. »
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Un mi-temps avec le club et un autre à travailler à côté
Des filles du Stade Rochelais encore à l’arrière, plus de temps pour un troisième arrêt et le dilemme est de taille : filer voir l’arrivée, ou accueillir les dernières avant le Vélodrome, à Roubaix. Deuxième option. Le temps de se garer et de se poster sur le bord de l’avenue Roger-Salengro, qui mène à l’enceinte. Hasard, on croise ici les parents de Chloé Schoenenberger, qui fait son baptême du Paris-Roubaix. Laurent et Hervé sont venus des Pyrénées-Orientales pour soutenir leur fille en bord de route et aider les autres coureuses du team. « Chloé est à mi-temps avec le club mais elle travaille à côté dans une entreprise de compléments alimentaires, nous expliquent-ils. Au total, cela lui fait le Smic. Et elle n’a pas de sponsors. »
La voilà qui arrive enfin. « Allez Chloé, allez, allez ! », lui crie sa famille. Laurence Schoenenberger est rassurée. « Je suis surtout soulagée qu’il n’y ait pas de chute. Il faut que j’appelle sa grand-mère, là ! » Il est donc temps de retourner au camping-car, à l’arrivée, pour rencontrer l’équipe. La première coureuse du stade, Frances Janse van Rensburg, a fini en 96e position, bien loin derrière la Canadienne Alison Jackson. Jean-Christophe Barbotin, manager général, tient à nous emmener au camion atelier pour jeter un oeil au vélo de Marine Allione, bousillé suite à une chute. Richard a quand même une petite déception. « Ah j’aurais bien aimé faire l’arrivée, au Vélodrome. Mais bon, ça me laisse un beau défi pour l’an prochain ! »
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