DÉBRIDER UNE PRATIQUE SEXUÉE : L’HMF CRETEIL PASSE À L’ACTION

 L’Haltérophilie Musculation Fitness (HMF) de l’US Créteil n’est pas un club comme les autres. Situé au sein d’un quartier populaire, il a l’inclusion sociale et le faire ensemble comme leitmotiv. L’espace de musculation était presque une zone de non droit avant que Linda Bouifrou, militante associative et avant tout féministe, s’engage avec d’autres camarades dont Irfaan Burahee (premier président quand ils ont repris le club, et actuel directeur administratif ) pour l’accès à l’espace sportif par les femmes. Le club compte aujourd’hui plus de 80 pratiquantes régulières. 

L’HMF a été, dans les années 80 et 90, le fleuron français de l’haltérophilie. Peu à peu, le club a périclité pour devenir un espace très territorialisé. Linda, l’actuelle présidente du club, n’a pas d’attrait particulier pour la musculation ou l’haltérophilie mais elle a vu en ce club, un projet de construction sociale.  «L’haltérophilie ne me disait rien mais j’avais une idée derrière la tête. Le club est tout près de chez moi. Il était très masculin, je ne pouvais pas y rentrer. Les femmes qui venaient étaient sifflées. Et en tant que bonne féministe je voulais l’intégrer pour faire quelque chose en faveur de la cause féminine. Mon idée était de travailler l’aspect genré de l’espace et la citoyenneté», explique-t-elle déterminée. Alors, Linda, Irfaan et leur bande, se sont lancés le défi de transformer ce club en un espace de mixité et d’y débrider la pratique sexuée. 

En 2012, Irfaan Burahee fédère les jeunes du quartier autour de son projet de développement et prend la présidence du club lors de son assemblée générale. Le début d’une belle histoire. Le projet validé se concentrait autour d’un axe majeur : l’égalité d’accès au sport pour les femmes. «Stratégiquement, nous savions que la mixité apporterait du réconfort. Les jeunes étaient un peu violents. La présence de femmes seraient un grand plus pour apaiser les tensions», développe l’ancien président et actuel responsable administratif du club. 

PRATIQUES INNOVANTES : LA CLÉDE LA RÉUSSITE ?

Du questionnement sur la transformation du corps à l’image masculine que ce sport dégage : la pratique de l’haltérophilie par les femmes est un challenge, un vrai. Sans compter la fracture sociale existante, l’éloignement très marqué des jeunes filles du quartier de la pratique sportive, les problèmes de surpoids et d’hygiène alimentaire. «Dans un premier temps, on voulait juste les amener au sport. Puis, nous avons dû créer des passerelles, des activités novatrices pour mener peu à peu les jeunes filles et les femmes vers le plateau de musculation et l’haltérophilie. Notre sport parait encore un peu barbare», complètent les deux acolytes. L’équipe de dirigeants a mis sur pieds plusieurs programmes spécifiques dont le zum’bolly’fitness, un mélange de zumba, de danse et de fitness. «Nous nous sommes demandés pourquoi les filles ne venaient pas au club.  On s’est essayés à plusieurs pratiques sportives qui cachaient l’haltérophilie notamment à travers la pratique des danses culturelles. Peu à peu, la musculation s’est installée dans l’échauffement puis elle a pris le dessus sur l’ensemble de la pratique».

VERS UNE MIXITÉGLOBALE

Sur le plan de la mixité, le travail du club ne s’arrête pas à la pratique sportive stricto-sensu. Il s’élargit à l’écosystème. Il a fallu repenser le lieu de la pratique, intégrer les femmes aux fonctions de direction et adapter les méthodes d’entrainements. «Les programmes d’entrainement de notre coach étaient adaptés qu’aux hommes. Il a fallu le former à la pratique féminine et l’amener à repenser son sport. Nous avons réalisé des formations en interne, comment faire de l’inclusion avec tous les salariés et bénévoles. La problématique était aussi liée à l’encadrement. Nous avons aussi travaillé à l’appropriation des lieux, en laissant les femmes tagguer leur matériel par exemple», explique Linda. Tout semble sur la bonne voie. Un prochain défi les attend : désacraliser la compétition. Avec la force de leurs convictions, rien n’est impossible !

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