Escalade sur glace – Marion Salmon-Thomas : « Sur un jour de compétition, tout est atteignable »
Alignée sur l’épreuve de difficulté dans ces championnats du monde 2024 d’escalade sur glace qui débute ce samedi 17 février à Edmonton au Canada, Marion Salmon-Thomas a de grandes ambitions. Après un début de saison marqué par une blessure, l’ingénieure tutoie à nouveau les sommets de sa discipline sur le circuit international. Focus sur les objectifs de l’actuelle numéro 2 mondiale mais aussi sur cette pratique sportive proposée comme sport additionnel pour les Jeux olympiques de 2030 et pourtant peu connue du grand public.
Les Sportives : Vous menez plusieurs vies à la fois. Parlez nous un peu de vous…
Manon Thomas : Je suis ingénieure de formation, à mi temps chez Danone pour être off sur la saison et ensuite avoir des jours d’entrainement le reste du temps. Je fais de l’escalade depuis que j’ai huit ans. Donc ça fait désormais 20 ans que je grimpe. J’ai attaqué la glace en étude supérieure. Ça fait maintenant six ans que je suis en équipe de France. J’ai arrêté l’escalade le jour où j’ai découvert la glace.
Vous avez donc pratiqué l’escalade sur mur et bloc avant de vous attaquer à la glace. Quelles différences faites vous entre la pratique sur glace et la pratique sur mur ?
C’est un autre sport. Déjà il y a une question de matériel, on n’est pas à mains nues, il y a le piolet entre nous et les prises. On est beaucoup plus dehors. Ce sont des efforts plus longs et plus endurants. On va souvent loin dans l’effort. Et ça, ça m’a vraiment plu. On va vraiment chercher le combat, un peu la douleur. Je continue l’escalade en parallèle mais plus en compétition.
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On parle d’escalade sur glace, mais c’est au final un peu plus large que ça…
Oui, on grimpe sur des structures artificielles qui sont faites de bois et de glace mais on est dehors. On ne passe pas nos weekend dans un gymnase. Sur l’étape en Suisse par exemple, on grimpe dans un parking. Toute la structure est au milieu, il y a des gens à tous les étages. C’est vraiment magique comme atmosphère.
Avec les étapes de coupe du monde mais aussi les entrainements, comment organisez-vous votre emploi du temps ?
Cette année, j’ai trois mois off pendant la saison. Ça permet de récupérer et ça change vraiment tout. Sinon le reste du temps, je faisais une moitié de semaine au boulot et le reste j’étais off. On a une structure internationale en France qui se situe à Champagny-en-Vanoise, c’est un de nos gros endroits d’entrainement. Et nous, on s’est construit des structures d’entrainement dans les garages où on tombe sur des matelas. Là, on va travailler les mouvements. Ca c’est plus en local. Sinon on est tous grimpeurs en parallèle, déjà parce qu’il n’y a pas assez de structures en France pour pouvoir faire du piolet toute l’année. On fait de l’escalade sur une partie de l’année et on reprend les piolets en aout.
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La glace n’est finalement pas si présente dans votre pratique…
Oui, la glace ce n’est qu’une partie de la discipline. On est sur des prises d’escalade sur laquelle on va poser le piolet sur la prise. L’objectif est d’aller le plus haut possible. C’est un jeu de pression. Si la prise est horizontale, on tire vers le bas et le piolet tient. On ne tape pas. On le pose. Et ca, on peut s’entrainer partout en dehors de la glace. Des parties sur glace il y en a mais ça, c’est qu’à partir de fin décembre.
Comment ces deux pratiques se traduisent en Coupe du monde ?
C’est essentiellement sur prises en réalité. Ce qui s’est passé, c’est qu’au début c’était que de la glace. Puis, le niveau a augmenté et c’est devenu de la rapidité. Donc ils ont créé une discipline vitesse. En parallèle, il y a eu la naissance d’une pratique mixte où les organisateurs allaient chercher des bouts de glaçons qui étaient pendus. Il y avait donc une alternance entre prises et glace. Au fur et à mesure, la discipline sur la roche est devenue une pratique à part entière. Aujourd’hui c’est vraiment la technicité sur prise qui fait la différence.
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Aujourd’hui, vous faites partie des meilleures grimpeuses au monde. Arrivez-vous à vivre de votre pratique ?
Depuis 2023, la Fédération est devenue délégataire et donc on a un statut de sportif et sportive de haut niveau. Et ça, ça nous a permis d’avoir des bourses notamment le CIP. Ça m’a vraiment aidé à professionnaliser ma pratique. Maintenant je suis semi-pro. C’est pas très pérenne parce que c’est renouvelé tous les 6 mois mais c’est déjà ça.
Le 27 janvier dernier, vous remontez sur la boite lors de l’étape de Saas Fee en Suisse quelques semaines après votre retour de blessure. C’est un retour plus que convaincant..
C’était particulièrement émouvant. Il y a trois mois je me suis faite opérer d’un syndrome des loges au niveau de l’avant-bras et ça été un gros combat pour revenir à haut-niveau et prendre le départ du circuit. Je suis allée à Cap Breton, en centre de rééducation. C’était un combat collectif avec la préparatrice mentale, le staff médical, etc. Du coup, ça rend la médaille encore plus belle et ces instants sur le mur encore plus précieux.
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Vous êtes actuellement deuxième au classement mondial. Les Championnats du monde sont ce weekend, quels sont vos objectifs ?
C’est l’objectif de l’année. Déjà parce que c’est le plus loin dans le calendrier, donc en terme de rétablissement et de retour à l’entrainement, c’était l’objectif numéro 1. Le mois de janvier a été vraiment top et je suis déjà fière de cela. C’est un rêve de monter sur un podium de championnat du monde. Sur un jour de compétition tout est atteignable. Je dirais qu’il y a dix filles qui peuvent aller chercher un podium.
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