JO – Escrime : Sara Balzer, médaille d’argent et mental d’acier
Remplaçante à Tokyo, Sara Balzer aurait pu ne jamais monter sur le podium. L’ancienne espoir alsacienne, gravement blessée à 22 ans, s’est pourtant tenue prête à entrer sur la piste à n’importe quel moment. La Strasbourgeoise accorde une grande importance à la préparation mentale dans sa carrière.
C’est la place la plus difficile, la plus exigeante. Quatrième sabreuse tricolore à Tokyo, Sara Balzer aurait pu ne jamais rentrer sur la piste, revenir en France sans médaille. Elle a finalement eu ses quelques instants de gloire, rentrant en finale à la place de l’autre Strasbourgeoise du groupe, Charlotte Lembach. Et pas face à n’importe qui : la championne olympique russe de l’épreuve individuelle, Sofia Pozdniakova. « Il y a beaucoup de choses qui se passent dans ma tête à ce moment-là, beaucoup de stress, de pression, d’enjeux d’un coup… Mais c’est quelque chose que j’avais travaillé avant avec ma préparatrice mentale. C’est énormément d’émotions, puis tout de suite beaucoup de concentration et d’analyse », décrypte la gauchère.
Sara Balzer assume faire partie de cette génération d’athlètes qui accordent une grande place à la préparation mentale. Lors de ses études, elle a d’ailleurs suivi en partie un cursus de psychologie, et est suivie depuis plusieurs années. « C’est primordial pour gérer les blessures, les défaites, les frustrations, le stress… Même au quotidien ça m’a beaucoup aidée », avoue l’escrimeuse. Dans cette olympiade marquée par la question de la santé mentale des athlètes, Sara salue le courage de Simone Biles, très attendue et qui s’est retirée pour se préserver. Elle ajoute : « C’est bien que les gens découvrent cette facette du sport de haut-niveau. C’est d’autant plus beau de réussir quand on sait ça. »
« Tout s’effondrait devant moi »
La Strasbourgeoise a aussi eu son lot d’attentes, de pressions et de doutes. Elle commence l’escrime à 8 ans, imitant sa grande sœur, et se démarque rapidement. Les maîtres d’armes la couvrent de louanges et la font participer à deux catégories de compétitions pour qu’elle progresse plus vite. « On me disait que j’avais un bon potentiel, de croire en moi, et comme je faisais souvent des podiums ça m’a donné envie de continuer. » À seulement 14 ans, elle devient championne de France… des moins de 17 ans. Trop juste pour les Jeux olympiques de Rio, sa carrière semble décoller définitivement en 2017.
À tout juste 22 ans, Sara savoure un titre de championne de France et connaît la joie d’un premier podium en Coupe du monde. Mais tout s’arrête lors de ses premiers championnats du monde à Leipzig. Sur une fente, la jeune femme pose mal son pied, le bilan est sans appel : rupture totale du ligament croisé antérieur. « C’est un coup de massue, ça arrive au plus mauvais moment car tout commençait à s’enchaîner. Et là on me dit qu’il y en a pour à peu près un an… Tout s’effondrait devant moi. » Mais là encore, l’Alsacienne fait preuve de ressources mentales hors-norme. Positive, elle s’implique totalement dans sa rééducation, remplace les compétitions par de l’analyse vidéo et du travail tactique. Une fois de retour sur la piste, il lui faut encore un an pour retrouver toutes ses sensations, ne plus craindre de faire un faux-mouvement.
L’origine du « quatuor argenté »
En 2019, elle remporte l’or en individuel et l’argent par équipes lors de l’Universiade d’été. Intégrée à l’équipe de France, elle apprend sa sélection pour les Jeux olympiques à la fin du mois de mai. « Ça a été une grande joie, un soulagement, c’était mon objectif depuis cinq ans d’aller aux Jeux. Il a fallu prendre le temps de le digérer pour se mettre un nouvel objectif : la médaille », sourit-elle. À Tokyo, elle est pleinement impliquée dans cette quête. « On a beaucoup travaillé sur la cohésion de groupe, cette idée de quatuor nous a guidé tout le long de la compétition. » Face aux caméras de France Télévisions, c’est elle, la quatrième fille, qui propose le surnom de « quatuor argenté » après la médaille.
« Au début on est déçues d’avoir perdu, et au fil de la journée on se rend compte que c’est dingue, on croise des sportif·ve·s qui n’ont pas de médaille… Avoir une médaille c’est rare, c’est exceptionnel », mesure Sara Balzer. Médaillée pour avoir remplacé Charlotte Lembach, qui prend sa retraite sportive, elle ne prend pas sa nouvelle place pour acquise. Elle a pourtant bien tenu tête à Sofia Pozdniakova, ne perdant son relais que 5 touches à 4. Mais elle sait que « les compteurs seront remis à zéro à la rentrée ». La Strasbourgeoise se fixe déjà le prochain objectif : deux médailles, en individuel et par équipes, à Paris 2024. Et cette fois-ci, en or et titulaire.
Propos recueillis par Xavier Regnier
Crédit photo : Sara Balzer
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