Arrivée en France à l’âge de 17 ans, Maria Iacob a navigué de challenge en challenge pour désormais diriger une entreprise dans le bâtiment, après une carrière longue de 11 ans dans le handball, dont 8 passés du côté de Mios-Biganos.
Article réalisé par Benoit Conta pour notre partenaire AJPH
Si certaines joueuses attendent d’engranger de l’expérience à la maison avant de faire le choix de l’aventure à l’étranger, Maria Iacob n’a pas attendu sa majorité avant de quitter la Roumanie. Née dans une famille de sportifs de haut niveau, la native de Ramnicu Valcea décolle en effet vers Toulouse dès l’âge de 17 ans. « Je suis arrivée avec ma grande soeur, Monica, qui était elle internationale, se souvient-elle. C’était une bonne chose car ce fut plus simple de vivre ce déracinement en sa compagnie. » Après un an dans la Ville Rose, elle accompagne à nouveau sa soeur à Angoulême, pour deux ans, avant de poser ses valises à Mios-Biganos, alors au début de son ascension vers les sommets.
« Là-bas, j’ai rencontré des gens formidables, une vraie famille. Du grand-père, Roger, au petit-fils, Emmanuel, on a vécu un grande aventure, avec notamment une victoire en Coupe de France (2009) et en Coupe d’Europe (2011). » Une aventure qui aurait pu tourner court pour Maria Iacob, blessée aux deux genoux dès sa première saison. « Le chirurgien m’a alors dit que je ne pourrais sans doute pas rejouer au haut-niveau. Mais c’était un beau défi pour moi, et derrière j’ai rejoué sept ans, glisse la demi-centre, avant de sourire. Il ne fallait peut-être pas me dire que ce n’était pas possible. » Reste que le corps de la joueuse la rappellera une nouvelle fois à l’ordre, en 2011.
« Le chirurgien m’a alors dit que je ne pourrais sans doute pas rejouer au haut-niveau. Mais c’était un beau défi pour moi »
Gravement blessée au début de sa carrière, Maria Iacob a depuis longtemps appris à jongler avec la douleur, venue notamment de ce cartilage à 90% endommagé. « A la clinique, j’avais ma carte d’abonnée, rigole-t-elle désormais. Quand j’arrivais, on me demandait tout de suite où j’avais mal. Et ce n’était pas uniquement le genou. Comme je compensais, j’avais des douleurs au tendon d’Achille, à la hanche… Et puis un jour, en 2011, le médecin m’a dit stop. Il m’a dit: « Ce soir, tu vas à l’entraînement, et tu annonces que c’est terminé, que tu ne joueras plus au handball ». C’était d’une violence… »
Un arrêt brutal
« De la lumière, tu te retrouves dans l’obscurité. On t’oublie… C’est un vrai choc. Et quand tu es sportif de haut-niveau, tu ne veux pas montrer tes faiblesses. Alors tu t’enfermes, il y a un vrai sentiment de solitude, se souvient-elle. Pendant un an et demi, j’ai vraiment eu du mal à aller voir jouer les filles. Je voulais couper pour ne pas m’infliger la douleur de penser que c’était fini. J’ai lu un jour que 65% des sportifs tombaient dans la dépression à la fin de leur carrière, ça ne m’étonne pas du tout. Ma chance à moi, c’est que j’avais tout de même déjà préparé ma reconversion. J’avais déjà quelque-chose vers lequel me tourner. »
Après 18 mois de « deuil », Maria Iacob, alors conseillère patrimoniale, se décide à relever un nouveau challenge. « Il me fallait un nouveau défi. Je me suis dit que, même si j’avais encore de nombreuses opportunités d’évoluer à la BNP, je ne me voyais pas derrière un bureau toute ma vie. Je passais d’une vie où mes journées faisaient 7h/22h avec l’entraînement, à un rythme un peu trop calme pour moi. Ca ne me correspondait pas, sourit celle qui décide de prendre en main son destin, pour monter son entreprise. J’ai fait une étude de marché, je me suis posée 1000 questions. Je voulais quelque-chose qui serve aux Français, mais je voulais aussi un lien avec mon pays natal, la Roumanie. » Ce sera donc SOCUB, une entreprise spécialisée dans la construction de maisons et bâtiments en bois, pour utiliser le savoir-faire roumain dans le bois.
Du temps du deuil de handball, au temps de la reconstruction
« C’est un milieu où il y a très peu de femmes, mais c’est peut-être ça qui m’a motivé, glisse la chef d’entreprise. Avec le sport, on m’a appris à relever les défis, à ne pas avoir peur, alors je me suis lancée. » Un défi qui aura couter quelques heures de sommeil à la gérante. « C’est un milieu que je ne connaissais pas du tout. Ce fut vraiment compliqué, stressant, avec des hauts, mais aussi beaucoup de bas. Ce sont des nuits à ne pas dormir, des week-ends à réfléchir… Mais je me suis accrochée », assène celle qui revendique désormais la gérance de deux entreprises en France, une autre en Roumanie, ainsi qu’une association avec Alienor Ingénierie.
« Le groupe représente 155 collaborateurs, à travers 6 agences en France. Je peux le dire maintenant, même si je n’ai pas encore l’expérience de certains, mais la machine est lancée, avec de très beaux projets en cours, conclut-elle. Maintenant rien n’est acquis, et on le vit actuellement avec le crise liée au COVID. Mais je ne suis pas angoissée, il faut toujours essayer de prendre le bon côté des choses. Et puis je crois que j’aime bien les difficultés. Ca permet de toujours trouver des opportunités et des solutions pour rebondir. » A désormais 37 ans, Maria Iacob n’est plus à un challenge près…
de Benoît Conta
Article extrait de Sortie de Vestiaire AJPH
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