Orane Ceris et le wingfoil, la révélation inattendue

Orane Ceris a commencé le wingfoil il y a deux ans. La gymnastique laissée de côté, elle se consacre entièrement à cette nouvelle discipline. Dès le 26 avril, elle participe au Mondial du vent, Coupe du monde GWA (Global Windsports Association) et fait partie des meilleures mondiales. Une progression fulgurante dans un sport encore en développement. Rencontre.

Les Sportives : Après plusieurs années à pratiquer de la gymnastique et à entrainer la gymnastique, en 2020 vous changez totalement de discipline pour le wingfoil. Pourquoi avez-vous arrêté la gymnastique ?

Orane Ceris : J’ai commencé la gymnastique à 6 ans et ensuite je suis passée entraîneure à 18 ans. Avant d’entraîner je suis allée jusqu’aux championnats de France. J’ai eu un accident de moto assez grave à 18 ans. C’était compliqué pour moi. J’ai arrêté la gymnastique pendant 1 an et puis j’ai décroché. Je n’arrivais pas à me dire que je n’allais plus être dans un gymnase, alors être entraîneure ça collait exactement à ce que je voulais.

Comment avez-vous découvert le wingfoil ?

Quand j’étais entraîneure de gymnastique, j’avais beaucoup de temps libre. J’ai commencé le surf et le kite puis j’ai rencontré Thomas Goyard (vice-champion olympique de planche à voile RS:X, NDLR), qui m’a fait essayer le wingfoil. J’ai galéré mais j’ai persévéré. Un jour, un ami m’a dit que je pouvais envisager de faire des compétitions. J’y ai réfléchi et puis la crise Covid est arrivée. Pendant le confinement en Nouvelle-Calédonie, il y avait une compétition en Europe. J’ai décidé de démissionner de mon poste d’entraîneure et de partir faire la compétition en Italie. C’est parti de là. Finalement, en arrivant en France, le sponsor Starboard a proposé de me suivre et c’était parti pour l’aventure.

En seulement deux ans, vous avez progressé très rapidement. Avec qui vous entraînez-vous ?

Je suis hyper bien entourée en Nouvelle-Calédonie. Il y a Clément Colmas qui est pro en stand up paddle et qui vient de passer pro en wingfoil. Thomas Goyard m’a beaucoup aidée et je me suis entraînée tout l’hiver avec Alexandre Ruiz, un ancien windsurfer. Ils me poussent vraiment vers le haut. Quand je suis arrivée en Italie, j’ai rencontré Olivia Piana et Marion Mattia. Elles m’ont expliqué les règles parce que je n’y connaissais rien. Il y a un gros groupe France, je pense qu’à un moment on va en venir à un collectif France. Ça pourrait être cool de bénéficier d’un effet de groupe.

En 2021, vous avez participé à plusieurs étapes de la coupe du monde. Vous attendiez-vous à faire des podiums et de tels résultats, 2^e aux WingFoil World Games et 3^e sur une discipline en Coupe du monde ?

Pas du tout… Je venais voir comment se passait une compétition, je n’avais aucune pression. La veille de la compétition, j’ai paniqué. Je ne me sentais pas du tout à ma place. Au final, après la première course je suis troisième derrière Olivia Piana et Marion Mattia. J’ai adoré ma semaine. Je faisais la course avec des copines, j’avais complètement oublié que j’étais sur des mondiaux. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire pour moi dans ce monde.

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En wingfoil, il y a deux types de courses : le freestyle, où chaque concurrente effectue des figures, et la race, qui est une course. Vous développez les deux ou vous vous concentrez sur une seule pour l’instant ?

J’essaye de développer les deux. J’ai compris que j’avais plus de potentiel en race. À l’entraînement cet hiver, on faisait des parcours avec les garçons. Je voyais que j’arrivais à les prendre sur certains parcours. J’ai hâte de voir le niveau des autres parce que tout le monde a progressé. En freestyle, c’est très difficile pour moi. Grâce à la gymnastique, j’ai mes repères dans l’espace donc ça m’aide. Le problème c’est que je ne plaque pas mes sauts, je n’atterri pas bien, donc ils ne comptent pas en compétition. J’envoie des sauts super hauts, des 360, des back flip… mais ça ne fait aucun point. Je vais faire mon maximum, mais en ce moment je suis un peu frustrée de mes performances.

« Je suis la première fille au monde a faire un back flip en wingfoil »

Orane Ceris en wingfoil freestyle. ©Clemens Conde

La coupe du monde GWA commence mardi 26 avril à Leucate, en France. C’est seulement la deuxième édition. Que pensez-vous du développement du wingfoil ?

La vitesse à laquelle ça s’est développé, je trouve ça dingue. Ça réunit pas mal de monde, notamment les kiters et les windsurfers. Au début, en Nouvelle-Calédonie, les gens n’aimaient pas vraiment. Et au final tout le monde s’y met. Ça ne fait que trois ans que ça existe, il y a déjà des coupes du monde avec un grand nombre de participants. Ça se développe dans le monde entier.

Il y a encore peu de femmes, pourtant, qui se lancent dans le wingfoil. Comment expliquez vous ce phénomène ?

Franchement je ne sais pas. Je vois énormément de filles à l’eau qui ont un super bon niveau. Je trouve ça dommage et en même temps je respecte leur choix. C’est un choix de vouloir faire de la compétition. C’est compliqué aussi parce qu’il faut un budget et des sponsors pour participer aux compétitions dans tous les coins du monde. Les filles se disent peut-être qu’elles n’ont pas le niveau, mais il faut y aller. C’est un nouveau sport, il faut en profiter pour se lancer. Sur Leucate on est une dizaine de filles, ça va être cool de faire des compétitions avec des filles.

Quels sont vos objectifs pour cette saison de wingfoil ?

Je n’ai pas envie de me mettre de pression mais j’ai conscience que j’ai des sponsors derrière moi. Si je me dis qu’il faut que je fasse des résultats, je sais que ça ne fonctionne pas. J’ai fini troisième sur le GWA en race l’année dernière, j’aimerais rester sur le podium. En freestyle je n’ai pas tellement d’attente niveau classement. Mis à part la compétition, j’ai envie de réussir entièrement le back flip. Je sais que je suis la première fille au monde à le faire.

Sinon, c’est surtout de continuer à me faire plaisir. Tant qu’il y a une bonne ambiance entre les riders, l’organisation et les sponsors, ça me va. Je fais le maximum pour m’entraîner et montrer à mes sponsors qu’ils ont eu raison de me faire confiance. Je prends ce qu’il y a à prendre et j’ai conscience de la chance que j’ai.

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Crédit photo : Clemens Conde