Para biathlon – Anaïs Bescond : « Etre spectatrice, c’est difficile »
La biathlète Anaïs Bescond, à la retraite depuis 2022 après une longue carrière internationale, est désormais l’entraineure nationale de tir de l’équipe de France de para biathlon. A l’approche de ses deuxièmes championnats du monde avec cette casquette (Canada du 6 au 10 mars), rencontre avec la championne olympique 2018 du relais mixte.
Les Sportives : Vous avez quitté le circuit professionnel de biathlon au printemps 2022 sans vraiment savoir de quoi votre avenir serait fait. Puis dès l’entame de la saison suivante, vous avez de suite endossée le rôle d’entraineur de tir du para biathlon français. Le biathlon vous manquez déjà trop ?
Anaïs Bescond : C’est un concours de circonstances. J’étais en fin de carrière sans avoir prévu la suite car le projet olympique de 2022 avait pris toute mon énergie, je n’avais pas voulu faire les choses à moitié. A la fin de ma carrière, j’ai été contactée par l’équipe de France handi qui m’a demandé ce que je devenais et si ça m’intéressait de faire ce métier. J’ai beaucoup réfléchi et j’ai essayé. Cela m’a beaucoup plu et maintenant, je continue avec eux.
A quoi avez eu besoin de réfléchir exactement ? Vous sentiez-vous légitime à ce moment-là avec ce public handisport que vous connaissiez peu ?
Oui, clairement, le public handi ce n’était pas forcément ce que j’ai côtoyé dans ma vie sauf à l’armée. Deux de mes athlètes aujourd’hui font partie de l’Armée des champions et étaient donc avec moi, mais pour autant je ne les avais jamais côtoyé dans leur quotidien d’athlète. C’était nouveau. Je ne me sentais pas tellement légitime car j’ai toujours considéré qu’être entrainé ne fait pas de nous des entraineurs. Alors je me suis inscrite au diplôme d’Etat, cela m’a donné des billes et aussi une forme de légitimité en me formant, et tout en apprenant sur le terrain. Il fallait bien commencer quelque part.
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Maintenant que vous êtes passée de l’autre côté, portez-vous un regard différent sur l’entrainement et la manière dont on vous a entrainé pendant toutes ces années ?
Oui, d’ailleurs, pendant ma formation cela a été un constat aussi de me dire que si j’avais fait ça autrement ou si on m’avait proposé autre chose, peut être que ma carrière ce serait passée différemment. Mais bon, j’ai toujours tendance à dire qu’avec des si on coupe du bois [rire]. Et en même temps, si les choses étaient à refaire, je ne suis pas certaine que je les ferais différemment car je n’avais pas les connaissances.
A l’aube de vos deuxièmes Championnats du monde en tant qu’entraineure, quelle saveur cela a d’y retourner à nouveau ?
Je le vis bien et à la fois c’est difficile. Je suis toujours passionnée par le biathlon et le para biathlon. J’ai envie que ça marche, j’ai ce côté perfectionniste. Si ça marche un peu moins bien, tout est décuplé. Quand j’ai quatre athlètes au départ, c’est quatre fois plus d’émotions que quand c’était juste moi. J’ai la triste position d’être passive. Tout ce qui est entre mes mains est de l’ordre du passé. L’entrainement, c’est derrière. Etre spectatrice, c’est difficile. Mais c’est une belle continuité et pouvoir faire bénéficier des mes années d’expériences engrangées lorsque j’étais athlète, je m’y retrouve.
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On entend souvent dire de la part des entraineurs et des encadrants d’équipe handisport qu’il y a une forme de supplément d’âmes quand ils évoquent le lien avec ces sportifs et sportives extraordinaires. C’est quelque chose que vous ressentez également ?
Je n’ai pas d’expérience d’encadrement dans une équipe valide donc je ne peux pas faire de comparatif. Je ne sais pas si c’est propre à mon équipe mais je ressens vraiment ce supplément d’âme. J’étais triste de quitter ma famille du biathlon mais je suis heureuse d’avoir découvert et d’en avoir rejoint une nouvelle avec cette équipe de para biathlon. Cela me correspond vraiment, j’aime vraiment ça. J’ai toujours été dans l’humain et le partage quand j’étais athlète. C’était des valeurs qui me portaient et je m’y retrouve complétement.
Sur ces championnats du monde de para triathlon, aucune athlète féminine française n’est au départ. Comment expliquez-vous cela ?
On a avant tout un déficit d’athlètes. On a que quatre para biathlètes qui ont le niveau international pour l’instant. C’est un tellement petit groupe que ça se voit beaucoup quand Chloé Pinto n’est pas là. Elle ne s’est pas qualifiée. Mais sur le groupe relève, on a un bel effectif de filles. La question c’est plutôt de réussir à avoir des athlètes tout court.
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