Paris 2024 – Guislaine Westelynck : « Ce que je souhaite vraiment c’est le développement de la pratique »
Avec la présence d’athlètes dans onze disciplines de son portefeuille, la Fédération française de handisport est au premier des Jeux paralympiques de Paris 2024. Dans un environnement sportif mouvant, sa Présidente Guislaine Westelynck, revient sur les opportunités que procurent une paralympiade à domicile mais aussi sur les difficultés tenaces pour se développer.
Les Jeux paralympiques arrivent à grands pas à la maison, c’est un évènement majeur dans l’histoire de la Fédération…
La périodicité des Jeux c’est ce qui rythme la vie de la fédération. La particularité cette fois-ci, c’est que c’est en France. Nous on n’est pas tellement impacté par l’organisation puisque ce sont le COJOP et le CPSF qui organisent et supervisent. Ce qui est aussi nouveau pour nous c’est qu’on a pu engager plus de moyens et plus de cadres. C’est une vraie fête.
Vous avez été médaillée d’argent sur 100m nage libre et de bronze au relais 4 x 100m 4 nages (Papillon) aux Jeux Paralympiques de Séoul 1988. 36 ans après, quel regard portez-vous sur l’évolution des Jeux paralympiques ?
La différence est incommensurable. On n’avait pas les mêmes conditions d’entrainement à l’époque des Jeux de Séoul. J’avais une activité professionnelle à côté et des enfants. Il fallait jongler avec tout ça. On n’avait aucune facilité contrairement à maintenant. J’en garde néanmoins un excellent souvenir. On faisait avec des bouts de chandelles mais c’était merveilleux. Surtout, c’était dans le plus strict anonymat.
On y est allé et on est revenu sans que personne n’en ait connaissance.
Personne ne savait ce qu’était le paralympisme. Désormais, c’est connu et reconnu. Tout le monde sait désormais que les Jeux paralympiques sont 15 jours après les Jeux olympiques.
L’organisation de ces Jeux vous a-t-elle déjà permis de mobiliser davantage les acteurs du handicap sur le développement de la pratique sportive ?
Quand il y eu la création de l’Agence Nationale du Sport. Il y eu une vraie prise de conscience des fédérations spécifiques, celle du handisport et du sport adapté. Les dirigeants de cette agence ont compris que nous sommes des sportifs à part entière et qu’il faut nous donner les moyens de fonctionner. Il y a eu une volonté politique de nous aider, des moyens humains et financiers ont été donnés.
Ces axes de développement s’orientent ils uniquement vers le sport de haut niveau avec la perspective de Paris 2024 ou cela s’applique t-il aussi à la pratique sportive de masse ?
C’est bien le haut niveau mais ce que je souhaite vraiment c’est le développement de la pratique. Il faut que toutes les personnes porteuses d’un handicap physique ou sensoriel puissent pratiquer dans le loisir, le bien être et le sport santé. Le souhait c’est de former les clubs de fédérations homologues à l’accueil de personnes en situation de handicap. Il y a eu le développement des clubs inclusifs. Ce sont des clubs ordinaires qui accueillent des personnes en situation de handicap. Le Comité paralympique et sportif français avait fixé l’objectif de 3000 clubs inclusifs. On va y arriver. Nous, on accompagne et forme ces clubs.
Quels sont les freins persistants pour la Fédération française handisport afin de développer les pratiques para sportives dans les territoires et les clubs ?
Ce qu’il manque, c’est l’information et la formation. Et puis tout dépend du degré de handicap dont on parle. Si on prend la natation par exemple, les clubs manquent de créneaux parce qu’on manque d’infrastructures sportives. Donc, ils vont entasser des jeunes et adultes dans des lignes d’eau. 10 personnes tournent dans cette ligne en même temps. Si on met une personne en situation de grand handicap dans cette ligne, c’est ingérable parce que cela va ralentir le rythme. Les autres nageurs vont avoir peur de lui faire mal.
Les clubs handisport ont, en ce sens, toute leur place pour accueillir le grand handicap.
Même si on forme les clubs ordinaires, ils n’auront peut être pas les moyens de les accueillir parce qu’on manque d’installations sportives.
Sur les 22 parasports présents aux Jeux paralympiques de Paris 2024, onze sont organisés et gérés par votre Fédération. Certaines fédérations délégataires comme le triathlon ou encore celle du tennis ont intégré la pratique handisport à leur portefeuille de développement. La discipline a donc quitté les bancs de la FFH. A termes, la fédération du parasport a-t-elle vocation à disparaitre pour que chaque fédération sportive se réapproprie le pendant handisport de sa discipline ?
Oui, un jour les fédérations spécifiques disparaitront. Mais dans très longtemps. Les Fédérations homologues ne sont pas toutes en capacité d’accueillir le parasport. Certaines sont vraiment motivées. Il y a des fédérations qui font cela très bien et je pense notamment au triathlon. On n’a jamais proposé cette discipline. Ils ont crée cela de toute pièce. Mais d’autres sont attirées uniquement par les médailles paralympiques. Et dans cas, il ne se passe rien dans les territoires parce que les comités en région sont noyés dans les problématiques de créneaux, de subventions, etc.
Le parasport est le cadet de leur soucis.
Mais au niveau national, les Fédérations ont demandé la délégation donc ces questions leurs reviennent. Les équipes de France ont alors plus de moyens mais derrière, souvent, il n’y a rien. Il y a des clubs, dont on a perdu la délégation qui finissent par revenir dans notre fédération pour qu’on puisse les accompagner.
Cela a une autre conséquence sur la Fédération handisport. Quand les résultats arrivent, que l’on est performant et qu’on nous enlève la délégation, les partenaires financiers partent également. Ce ne sont pas des philanthropes. Ils veulent briller et être médiatisés. Sans ces médailles, ils ne le sont plus. Et par conséquent, cela nous empêche de faire davantage de développement.
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