Dans quelques jours, 31 footballeuses du monde entier vont grimper le Kilimandjaro et jouer un match sur le plus haut sommet d’Afrique. Derrière cette belle aventure et une tentative de record du monde, le projet a l’objectif est de réveiller les consciences sur la place des femmes dans le football et dans le sport.
Sandrine Dusang est quasi prête. « C’est bon, j’ai acheté toutes mes affaires, rassure l’internationale française, jeune retraitée des terrains après 17 années au haut-niveau. Il y a des choses que j’ai commandé exprès pour cette ascension. » Le 18 juin, en Tanzanie, elle participera à un projet en compagnie d’une trentaine d’autres footballeuses du monde entier. Initié par l’organisation non-gouvernementale Equal Playing Field, le projet « Altitude Football » consistera pour les footballeuses à gravir, dans un premier temps et en huit jours, les 5900 mètres du mont Kilimandjaro. Après avoir grimpé, les 22 footballeuses descendront du point culminant d’Afrique sur quelques mètres. Dans un cratère de la zone montagneuse, elles installeront des plots pour jouer un match de foot de 90 minutes.
De mémoire de footballeuse, Sandrine Dusang ne se souvient pas avoir déjà joué sur un tel terrain. « Ce sera davantage une surface dure en pierres que du gazon. C’est aussi ça qui est quelque part excitant, ca sort de l’ordinaire. » Un match de football à une telle altitude sera aussi si exceptionnel qu’une équipe du Guinness World Record sera présente pour l’évènement. Si les footballeuses réussissent, l’opération battra en effet le record du monde du plus haut match de foot jamais joué. « Le terrain éphémère sera tracé la veille de la tentative, avec des dimensions minimales mais assez conformes pour que le record soit homologué », précise Sandrine Dusang.
Pour se préparer, de la randonnée et des tests en altitude
Contactée par les organisateurs pour participer au challenge, Sandrine Dusang n’a pas longtemps réfléchi. « Ils recherchaient des footballeuses françaises, j’ai tout de suite accepté car c’est un défi sportif super intéressant. » Grimper le Kilimandjaro sera une première pour la néo-retraitée des terrains, passée par l’Olympique Lyonnais et le FC Juvisy. Un temps partante, sa coéquipière de Juvisy Julie Soyer s’est blessée et a dû déclarer forfait.
Histoire d’être d’attaque pour l’ascension, Sandrine Dusang a fait une préparation avec beaucoup de marche ainsi que de la randonnée, avec de gros sacs sur le dos. « J’ai déjà skié, mais pas à cette altitude donc forcément, j’appréhende un peu. » A une telle altitude, le mal des montagnes peut en effet être redoutable : 30% des ascensions se finissent mal. Face à ces conditions extrêmes, Sandrine Dusang estime que son expérience d’athlète sera un plus. « J’ai une base foncière intéressante acquise du foot donc je ne pars pas de zéro, se rassure la défenseure, cinq fois championne de France et vainqueur d’une Ligue des Champions. Quant à la partie mentale et le dépassement de soi, je pense qu’on a déjà des bases solides en tant que sportives. » Pour autant, la joueuse a suivi quelques examens médicaux, avec des simulations en altitude, pour vérifier que son corps est prêt à fonctionner à cette hauteur. « Je sentais déjà la différence alors qu’on était à 30% d’oxygène en moins. Là-haut, on sera à -40%…en fin de compte, on va peut-être plus marcher que courir ! »
« Réveiller les consciences dans le monde sur le manque d’opportunités et de visibilité pour les femmes dans le football et dans le sport. »
Des camps d’entraînement pour promouvoir le foot féminin
Le projet « Altitude Football » n’est pas qu’une performance sportive, comme l’explique Emma Humphris, qui travaille sur le défi au sein d’une équipe de 60 personnes. « Equal Playing Field a été créé par un groupe de filles qui ont décidé qu’elles voulaient faire quelque chose pour changer la façon dont les femmes sont perçues dans le foot et dans le sport. » Avec ce record du monde, l’initiative vise à réveiller les consciences dans le monde sur le manque d’opportunités et de visibilité pour les femmes dans le football et dans le sport. Cette ascension et ce match en altitude sont les premières actions d’envergure réalisées par le collectif. « On souhaite utiliser cet événement pour exposer ces problématiques. » Mais l’initiative ne s’arrêtera pas là.
Après l’ascension du Kilimandjaro, les footballeuses tiendront des camps d’entraînement au football dans de nombreux pays. « Nous avons prévu des événements en Tanzanie, la Zambie, l’Afrique du Sud ou encore le Népal, se réjouit Emma Humphris. Notre objectif est d’avoir un impact sur le long terme. » Sur les différents sites des camps d’entraînement, l’initiative sera encadrée par des associations caritatives qui luttent pour faire évoluer la place de la femme dans le sport. « Ces associations ont déjà mené à bien de beaux projets et l’idée est aussi de faire la lumière sur leur travail et de l’amplifier. »
Sandrine Dusang se réjouit de l’opportunité qu’elle va avoir de rencontrer des footballeuses du monde entier. « Jouer avec des joueuses afghanes, égyptiennes ou encore libanaises…je ne l’ai jamais fait et sans ce projet, je ne l’aurai sans doute jamais fait ! Ce partage des cultures…c’est aussi ce qui va faire la richesse de cet événement ! » Au sommet du Kilimandjaro et lors de ce match, ces footballeuses seront toutes unies dans le même objectif. « On a envie de montrer que même lorsque ce n’est pas facile, des femmes avec du caractère peuvent venir, montrer qu’elles sont toutes autant capables que des hommes, et casser des barrières. On veut montrer que les femmes peuvent aussi réaliser des trucs fous ! »
Propos recueillis par Assia Hamdi
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