Passer de la 1ère à la 170e place, c’est un coup dur pour une athlète de haut niveau. Mathilde Sénéchal, étudiante en Droit et sportive de haut niveau en athlétisme en témoigne. A 22 ans, elle raconte comment elle s’est servie de son plus gros échec pour devenir Championne de France de cross quelques années après.
Sans prétention, Mathilde Sénéchal a souhaité partager son expérience de sportive de haut niveau. A travers un article posté sur son linkedin début juillet, la jeune femme de 22 ans a souhaité partager son expérience sur la gestion du mental dans le sport, car le sport de haut-niveau lui « en offre tous les jours. »
Un départ en tête pour finir à la 170ème place
Le 1er mars 2015, je m’alignais sur la ligne de départ du Championnat de France de cross cadette. Après 3 ans d’athlétisme, je me positionnais comme la grande favorite. Mes séances d’entrainement présageaient de belles choses, j’étais en forme, tous les signaux étaient au vert. Et pourtant… je finis à la 170ème place du Championnat aidée par une de mes coéquipières.
Alors que j’étais dans le groupe de tête, une concurrente passe devant moi. Cette simple attaque a déclenché un stress extrême dans mon corps allant jusqu’à complètement me tétaniser. Mes jambes sont devenues lourdes, mes épaules se sont contractées, ma respiration s’est accélérée… c’était le début de la fin. Une, puis deux, trois, quatre filles me passent devant. J’avais l’impression de ne plus rien contrôler. Chaque mètre effectué était de plus en plus difficile.
J’ai encore du mal aujourd’hui à remettre en place toutes les pièces du puzzle.
Portée jusqu’à la ligne d’arrivée par ses coéquipières
J’ai subi toute la fin du parcours. Je n’avais plus aucune maitrise, je me décomposais. Quatre cents mètres avant la ligne d’arrivée, je titube, je lutte car je sens que je suis prête à m’écrouler. Je vacille jusqu’à réellement m’effondrer sur les banderoles délimitant le terrain. Je n’ai plus conscience de rien, mes yeux sont fermés. Heureusement une de mes coéquipières me dépasse et décide de me relever pour me porter jusqu’à la ligne d’arrivée. J’ai été transféré directement dans la tente de secours et mise sous perfusion.
Affronter le regard des autres
Il a fallu affronter le regard de mes autres coéquipières et de mon entraineur, tous très déçus de ma contre-performance. Moi-même, la principale protagoniste, je ne comprenais pas. Je n’avais aucune explication. J’étais forcément extrêmement déçue. Cela n’a pas été facile à accepter.
J’avais alors 17 ans et deux choix possibles : soit me dire que je n’étais pas assez forte mentalement pour continuer ce sport, soit tenter de comprendre ce qui s’était réellement passé pour ne plus que cela se reproduise.
Depuis que j’ai appris à utiliser mes expériences, je n’ai plus peur de perdre.
Rebondir et se faire accompagner
Je suis allée voir un préparateur mental, une sorte de psy axé sur le sport et la performance. Il fallait que j’apprenne à me connaitre, à m’analyser pour mieux me comprendre. Le but était de saisir mon fonctionnement pour trouver les clés nécessaires afin de faire tomber les verrous.
Aujourd’hui cela fait cinq ans que je travaille avec mon préparateur mental. Alors, non cela ne fait pas cinq ans que je n’ai pas perdu de courses, au contraire. Mais cela fait bien cinq ans que maintenant, après chaque échec, chaque déception, je prends le temps d’analyser et de comprendre ce qui n’a pas été.
Apprenons alors à apprécier nos échecs à juste titre, à se relever, rebondir pour continuer d’avancer. Il ne s’agit pas de ne pas être déçu ou triste, ces sentiments sont normaux lorsque le projet nous tient vraiment à coeur. Il s’agit plutôt d’utiliser cette déception pour la transformer en un véritable moteur.
Evidemment les victoires me permettent d’avancer et me donnent envie de continuer à m’investir autant dans mon sport. Mais, depuis que j’ai appris à utiliser mes expériences, je n’ai plus peur de perdre.
Je suis persuadée que si je n’avais pas fait cette 170ème place au Championnat de France en 2015, je ne serais pas celle que je suis aujourd’hui. Ma médaille d’or, obtenue enfin en 2018 brillait davantage. Pour rien au monde je ne voudrais revenir dans le passé pour changer cela.
Vous avez relevé une coquille ou une inexactitude dans ce papier ?
Proposez une correction à notre rédaction.
Vous avez aimé cet article ?
Retrouvez tous nos articles de fond dans le magazine
S’abonner au magazine